Bruxelles ouvre la chasse aux Airbnb: La Région, les communes et les copropriétés à l’attaque. L’Europe en défense.

Bruxelles ouvre la chasse aux Airbnb: La Région, les communes et les copropriétés à l’attaque. L’Europe en défense.

Même si peu de particuliers le savent, cela fait longtemps que la Région bruxelloise et certaines communes ont réglementé l’installation des logements Airbnb.

Une ordonnance bruxelloise du 08 mai 2014 entrée en vigueur en avril 2016 règlemente l’installation et l’exploitation ce type de logement à Bruxelles (ordonnance bruxelloise relative à l’hébergement touristique http://www.ejustice.just.fgov.be/eli/ordonnance/2014/05/08/2014031471/justel ).  Le propriétaire doit notamment déclarer son activité auprès de l’administration, obtenir une attestation de sécurité incendie et son logement doit répondre à certaines normes intérieures. (Voy. http://werk-economie-emploi.brussels/fr/hebergement-touristique)

En sus, et comme de bien entendu, il y a une taxe à payer par nuitée et par chambre. (voy. https://fiscalite.brussels/taxe-regionale-sur-les-etablissements-d4hebergement-touristique et pour le texte de l’ordonnance http://www.ejustice.just.fgov.be/cgi_loi/change_lg.pl?language=fr&la=F&cn=2016122309&table_name=loi )

Les contrôles menés par les quelques agents régionaux ne sont pas légion ; mais ils auraient quand même rapporté depuis 2016 pas moins de 200.000 € pour 120 amendes. Cela ne fait « que » plus ou moins 40 amendes par an à l’échelle régionale ; mais la Région entend durcir le ton.

Les communes peuvent aussi agir en la matière. A l’instar de dix villes européennes unies depuis juin 2019, la Ville de Bruxelles part en guerre en affirmant que sur son seul territoire il y aurait 2.200 appartements loués en Airbnb (il y en aurait 7.400 pour toute la Région).  Elle y voit un manque à gagner car moins il y a de personnes domiciliées effectivement dans ces logements, moins elle perçoit d’additionnels à l’impôt des personnes physiques.

Elle entend bien donner le ton et ce par deux biais.  La première arme est urbanistique : en effet, s’il n’est bien sûr pas illégal de louer une chambre en Airbnb, il faut respecter l’ordonnance régionale sub-citée laquelle impose que le propriétaire soit domicilié en les lieux (exit donc les logements acquis pour être consacrés exclusivement à ce type de location).  L’autre arme est fiscale et est déjà largement utilisée par certaines communes bruxelloises, à savoir la taxation sur les immeubles inoccupés.  De fait, un logement loué exclusivement en Airbnb est un logement où personne n’est domicilié et partant un logement vide … et donc taxable.

Pour conclure, on rappellera que – au-delà de ces contrôles des autorités – les associations de copropriétaires (ACP) peuvent parfaitement et en toute légitimité s’opposer à ce qu’un copropriétaire loue son bien par le biais de la plateforme.  Mieux encore lors de son enregistrement le copropriétaire doit fournir normalement l’accord écrit de l’ACP (art. 7 § 1, 6°et 7° de l’arrêté d’exécution de l’ordonnance bruxelloise). Ces dernières années, les cas de décisions d’assemblée générale interdisant totalement ou limitant les locations Airbnb dans les copropriétés sont donc multipliés et, sauf quelques exceptions, les Cours et Tribunaux donnent raison aux ACP (Voy. JP Anvers, n° 18A1635/2 ; Civ. Flandre occidentale (div. Bruges), n° 17A1187).

Bruxelles étant le cœur de l’Europe, on ne résistera pas à terminer cet article en ajoutant que la Commission européenne a lancé une procédure d’infraction en janvier 2019 contre la Belgique (visant la Région) considérant que les règles bruxelloises reprises dans l’ordonnance ne respecteraient pas le principe de proportionnalité contenu dans la directive organisant le marché unique des prestataires de services. Bruxelles Europe souhaite que Bruxelles Région corrige son ordonnance au profit des particuliers voulant louer en Airbnb…

 

Gilles Oliviers,
Avocat associé RENSONLEX