Les baux d’étudiant en Région wallonne et la crise actuelle : l’étudiant peut-il mettre fin au bail anticipativement ?

Les baux d’étudiant en Région wallonne et la crise actuelle : l’étudiant peut-il mettre fin au bail anticipativement ?

Pour rappel, le droit du bail a été sensiblement réformé il y a quelques années et le « bail d’étudiant » est, depuis lors, spécifiquement régi par les régions. Les baux d’étudiant concernent les contrats de bail relatifs à la location d’un logement par ou pour le compte d’un étudiant et ce, dans le cadre de l’accomplissement de ses études.

 En Wallonie, le bail d’étudiant est régi par le Décret du 15 mars 2018 relatif au bail d’habitation, entré en vigueur depuis le 1er septembre 2018.

(https://www.ejustice.just.fgov.be/cgi_loi/change_lg.pl?language=fr&la=F&table_name=loi&cn=2018031513)

 Il est par ailleurs important d’être vigilant dans l’exécution de ces contrats de bail d’étudiant dès lors que certaines règles différent entre la Région wallonne et Bruxelles.

 

 A l’heure de la rédaction du présent article et depuis le début de la crise sanitaire, une des mesures prises par le gouvernement fédéral en date du 18 mars 2020 afin de faire face au COVID-19 consiste en la fermeture des universités et des écoles supérieures. Les cours sont donc, depuis lors, suspendus et donnés de manière électronique afin de pouvoir respecter les mesures de distanciation sociale.

 Dans un premier temps, ces mesures étaient fixées à tout le moins jusqu’au 19 avril 2020 ; nous savons maintenant que les mesures ont été prolongées, sans aucune perspective de réouverture des universités. En effet, nous n’avons actuellement aucune connaissance des mesures envisagées pour ouvrir à nouveau les écoles supérieures et les universités, ni la temporalité desdites réouvertures.

 Ces incertitudes posent des inquiétudes aux étudiants locataires qui, pour beaucoup d’entre eux, ont rejoint leur domicile familial pendant le confinement et n’occupent donc plus leur kot et ce, jusqu’à nouvel ordre. Ces étudiants ont dû faire un choix ou ont parfois été contraints de rentrer chez eux car leurs « communs » ne permettaient pas le respect des mesures de distanciation sociale. Pour bon nombre d’étudiants, leur loyer était honoré grâce à des emplois étudiants mais ces étudiants se retrouvent actuellement sans emploi et, de facto, sans revenus pour continuer à honorer leur loyer.

 D’autre part, ces mesures prolongées et pour lesquelles on ne voit pas encore la fin inquiètent également les bailleurs, qui sont confrontés à de nombreuses demandes de réduction de loyers et charges ou de résiliation de bail.

 

 Dans le cadre des mesures d’aides à la population touchée économiquement par la crise, le Gouvernement wallon a adopté un Arrêté du Gouvernement wallon de pouvoirs spéciaux n°22 du 22 avril 2020 prenant des mesures diverses en matière de bail d’habitation et publié au Moniteur Belge le 28 avril 2020.

(http://www.ejustice.just.fgov.be/eli/arrete/2020/04/22/2020010365/moniteur)

 Par le biais dudit arrêté, le gouvernement wallon a décidé d’adopter de nouvelles mesures de soutien et notamment, de mettre en place des procédures transitoires, non prévues par le Décret du 15 mars 2018 permettant de négocier une révision du loyer ou une résiliation anticipée du bail d’étudiant, moyennant préavis dont le délai est réduit.

 En effet, l’article 1er, 2° de l’Arrêté du Gouvernement wallon de pouvoirs spéciaux n°22 stipule « à défaut de tout autre accord entre les parties visant à mettre fin anticipativement au bail étudiant ou à en réduire le loyer, par dérogation à l'article 81 du décret du 15 mars 2018, le ou les preneurs d'un bail dont la ou les personnes qui en supportent régulièrement la charge du paiement du loyer ont subi conjointement une perte d'au minimum 15% de ses/leurs revenus en raison des mesures de confinement peut, à tout moment, mettre fin au bail moyennant un préavis de 1 mois et le versement d'une indemnité de 1 mois de loyer au bailleur. ».

 La durée de préavis, tant pour les baux d’étudiants que pour les baux de courte durée liés à un logement étudiant, est donc temporairement réduite à un mois (contre deux mois prévus actuellement par le Décret du 15 mars 2018 en Région wallonne) et ce, lorsque le preneur (parents ou étudiant) d’un logement étudiant a subi une perte de revenus de minimum 15% en raison du confinement.

 La preuve de la perte de revenus peut être apportée par tous moyens.

 Ledit préavis prend cours le 1er jour du mois suivant l’envoi du renon, qui devra respecter les prescrits légaux pour être valable. Durant cette période de préavis, le locataire reste par ailleurs redevable de son loyer et charges envers son bailleur.

 Pour aider les propriétaires qui devront faire face à ce préavis réduit, ces derniers auront droit, outre le paiement du loyer durant la durée du préavis, à une indemnité d’un montant équivalent à 1 mois de loyer.

 L’Arrêté du Gouvernement wallon de pouvoirs spéciaux n°22 entre en vigueur le lendemain du jour de sa signature, soit le 23 avril 2020.

 

 Cette mesure relative à la réduction de la durée de préavis pour les étudiants ne doit néanmoins pas être privilégiée au dialogue entre preneur et bailleur.

 En effet, une discussion entre les intervenants pour tenter de dégager un arrangement amiable (tels qu’une résiliation du bail, une réduction temporaire du prix ou un échelonnement de paiement) est vivement conseillée et ce, d’autant plus compte tenu des circonstances actuelles.

 Ces dispositions "exceptionnelles" précitées ne seront donc pas d'application si propriétaires et locataires ont conclu un autre type d'accord !

  

Lauriane della FAILLE

Avocat

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